COE - Séance de travail sur l’orientation - Lundi 20 octobre 2008
Compétences, pratiques et formations nécessaires à la fonction de conseil en orientation sachant qu’elles varient sans doute en fonction des publics qu’il s’agit d’orienter
Ce document et son annexe Que sait-on de l’efficacité de l’information ? traitent de la question sous l’angle des points-clés définis par l’Association Nationale des Directeurs de CIO.
- ANDCIO contribution générale
- COE - L’orientation
1-Un ancrage spécifique
La spécificité des centres d’information et d’orientation détermine la fonction de conseil pratiquée dans nos services. Elle est, en tout premier lieu, d’être un service public de l’éducation, garantissant le droit au conseil en orientation et à l’information sur les enseignements et les professions défini par la loi
2-Les valeurs attachées au droit au conseil en orientation
L’objectif étant de répondre aux besoins du public avec la plus grande qualité possible rappelons quelques éléments déontologiques attachées à cette fonction de conseil :
- Centrer notre action sur la personne, les besoins qu’elle exprime, les contraintes dans lesquelles s’inscrit sa demande
- Disposer de ressources en matière d’information dont le caractère soit pluriel et indépendant, la fiabilité contrôlée, la lisibilité et l’accessibilité optimum
- Le conseil en orientation s’inscrit dans un cadre de développement de la personne et se construit de manière distanciée par rapport aux différents acteurs sociaux, économiques, politiques et aux enjeux dont ils sont porteurs.
3-Le public auquel s’adressent nos centres
Si les conseillers d’orientation psychologues, lorsqu’ils interviennent en établissement scolaire ont affaire au public « captif » que constituent les élèves et étudiants, ils ont à accueillir au sein des CIO tout type de public (scolaires, apprentis, jeunes non scolaires, stagiaires, adultes). Cela correspond au concept d’orientation tout au long de la vie dans lequel les centres se sont progressivement inscrits dès leurs origines.
4-Les pratiques du conseil individuel en orientation
Nous intervenons le plus souvent dans le cadre particulier du développement de jeunes, dont la particularité est de changer à mesure qu’ils avancent en âge, et, de ce fait, de connaître des évolutions permanentes de leur compréhension des enjeux de l’orientation. Nous pouvons dire que cela « colore » nos pratiques du conseil individuel en orientation qui nécessitent :
Des savoirs
- Connaissance des formations, des métiers et du monde professionnel, des débouchés prévisibles et de l’insertion des jeunes, sur le bassin d’emploi, mais bien au-delà également, de la région au national, et, de plus en plus, de l’Europe à l’international
- Connaissance du développement cognitif et affectif, des fonctionnements inter et intra- psychiques, des représentations sociales, des techniques d’évaluation et d’autoévaluation des aptitudes, compétences, des intérêts, des dispositions et valeurs
- Connaissance des théories de la sociologie, des modèles macro et micro-économiques ainsi que de l’ensemble des outils issus des sciences humaines pertinents pour percevoir ce que les contextes ont de spécifique et assurer le conseil en orientation.
Des savoir-être
- Se former à l’accompagnement des publics, - pour permettre au consultant de découvrir ses compétences et ses ressources propres - car c’est lui qui s’oriente tout au long de sa vie -, et faire siennes les habiletés bien particulières du psychologue indispensables au métier de conseiller d’orientation
Des savoir-faire
- S’approprier les méthodologies adaptées au consultant (quel que soit son âge) pour lui permettre de dépasser ses déterminismes
- Savoir se positionner vis-à-vis des enjeux liés à la décision d’orientation : conflits de valeurs dans la relation parent/enfant, conflits d’intérêts liés à l’institution scolaire, conflits d’intérêt liés aux métiers eux-mêmes (notions de prestige, de représentations sexuées, de rentabilité financière).
On signalera enfin que ce travail particulier concernant la construction de personnes en devenir permet une approche plus large concernant des publics adultes qui se re-posent dans d’autres conditions la question de leur devenir.
5- L’ingénierie de l’orientation
Un ensemble de dispositifs collectifs d’orientation et de guidance concourant à la capacité des personnes à s’orienter existent sous diverses formes.
Les conseillers d’orientation psychologues, dans le cadre d’actions pilotées par le directeur du CIO et inscrites dans les objectifs nationaux et académiques, jouent un rôle actif dans la mise en œuvre de multiples projets.
La coordination du CIO en tant que service est essentielle pour ces projets
À titre d’observation du bassin de formation ou du district scolaire
- Fonctionnement de l’orientation dans le bassin et les établissements scolaires
- Observation du cursus des élèves et suivi des élèves en rupture
- Réalisation d’enquêtes en fonction des besoins des acteurs du système éducatif.
À caractère général : mise en œuvre de projets ou dispositifs particuliers
- Actions d’éducation à l’orientation fondées sur des méthodes spécifiques
- Formations ou accompagnements des projets des équipes enseignantes (découverte professionnelle 3h)
- Valorisation de la voie professionnelle
- Diminution des redoublements et réorientation en fin de seconde
- Travaux sur la question du genre (orientations des filles, des garçons)
- Travaux sur la question de l’orientation vers les filières scientifiques et technologiques
Ouverture de l’école sur l’environnement socio-économique
- Participation ou construction de forums découverte des formations ou des métiers
- Préparation aux stages en entreprise sous l’angle de la construction de l’orientation
- Partenariat avec les organisations d’employeurs et de salariés
- Implication dans les cités des métiers
- Partenariat avec diverses structures : par ex., traitement concerté avec le réseau public d’insertion des jeunes des élèves en rupture, décrocheurs, sans solutions de formation.
Divers
- En certains endroits, travail en commun et échanges permanents depuis plusieurs années avec les INSA pour le recrutement de leurs élèves ingénieurs (conception et réalisation des procédures)
- Recrutements dans les écoles d’infirmières
- Rôle spécifique dans le dispositif VAE de plusieurs régions/académies.
Dans le cadre de la participation de plus en plus grande des enseignants aux dispositifs d’aide à l’orientation des élèves, un besoin essentiel de formation, de mise à disposition de l’information, de construction de démarches et de coordination des différents acteurs ne manquera pas de se faire jour : cela relève aussi de cette ingénierie de l’orientation.
Afin de réaliser l’ensemble des actions considérées au point 5, il est utile d’envisager le CIO comme lieu neutre permettant aux divers acteurs de se rencontrer dans leur démarche de mise en œuvre des interventions adaptées aux besoins du public. Pour les nommer :
- Acteurs institutionnels (services de l’État ou des collectivités territoriales…)
- Acteurs du monde économique (employeurs, fédérations de secteurs professionnels, organismes et associations patronales et de salariés)
- Acteurs de la formation (initiale, alternance, public, privé sous contrat…)
- Acteurs de l’insertion (missions locales, maisons de l’emploi, associations diverses, programmes spécifiques…)
Rappelons que des travaux en commun avec les partenaires de l’information, de l’orientation, de l’insertion existent déjà, que ces partenariats sont indépendants des lieux d’implantation des structures mais que cela ne les empêche pas de fonctionner bel et bien sur la réalisation de projets communs au bénéfice des publics.
7- Des outils et une conception de la fonction de conseil
L’ensemble des outils utilisés dans le cadre des CIO répond à une exigence forte de validité et de fiabilité issue d’une tradition scientifique historique adossée à l’existence de centres de formations et de recherche comme l’INETOP.
Que ce soit dans les domaines de l’information ou des outils d’aide à l’orientation (logiciels et questionnaires d’intérêts, de valeurs, d’évaluation des compétences), la formation des COP et l’exigence déontologique des CIO en autorisent une pratique contrôlée.
Le recours de plus en plus généralisé aux sites internet renforce de toute évidence la nécessité de la construction d’outils d’accompagnement de plus en plus sophistiqués.
On trouvera des détails sur ce point dans les textes plus spécialisés présentés par ailleurs. Disons simplement ici que le rôle des conseillers exerçant dans le cadre des CIO est de concourir au développement du « savoir s’orienter » (référence au ‘Pilier 7’ du socle des compétences défini en collège, mais également aux propositions fondamentales de la convention de Lisbonne et au concept d’orientation tout au long de la vie).
C’est bien d’une capacité de l’individu dont il s’agit. Pas d’une injonction extérieure à s’orienter, formatée de telle ou telle manière. La fonction de conseil, ancrée dans l’éducatif et de développement des personnes, y trouve son sens. Rendre la personne experte de ses choix, est, en effet, il faut le dire, le redire encore, un long processus toujours recommencé, aux différents âges et dans les différentes circonstances de la vie.
8- Amélioration des compétences, des pratiques et de l’exercice de la fonction de conseil en orientation
Propositions de l’ANDCIO pour améliorer les réponses au public et le fonctionnement des centres d’information et d’orientation
- L’existence indispensable du CIO pour une pratique de conseiller cohérente. Des conseillers d’orientation psychologues isolés, en établissement de formation, connaîtraient un appauvrissement rapide de leur pratique à destination des élèves et de leurs familles. Le CIO leur permet de développer une vision complète des dispositifs de formation, des contacts avec les milieux socio-économiques, dans le cadre d’échanges permanents avec les collègues garants d’une pratique cohérente.
- La nécessité de s’adresser à tout public. L’enrichissement des pratiques des conseillers découle à la fois d’une identification claire de publics prioritaires (élèves et étudiants) mais également de la capacité du CIO à s’inscrire dans un concept d’orientation tout au long de la vie au travers de leur investissement en direction d’autres publics en situation d’élaboration de projet professionnel ou de formation.
- La nécessité d’une structure juridique forte pour les CIO. L’ensemble des travaux d’ingénierie de l’orientation décrits ci-dessus s’appuient sur une notion de territoire large, associant de nombreux partenaires aux statuts divers. Pour assurer un service au public s’étayant de ces diverses compétences, les CIO ont besoin d’une plus grande autonomie à des fins de gestion, de contractualisation et de développement des stratégies d’action et d’intervention. Des statuts juridique et règlementaire de centre et de directeur clairs et renforcés sont à cet égard des moyens nouveaux de mieux répondre aux besoins de la population.
- Une structure au service de ses usagers. Sur les bases d’une définition d’objectifs prioritaires au niveau national comme académique, l’échelon « naturel » de fonctionnement d’un centre est le cadre du bassin de formation. Un conseil de centre comprenant des représentants des établissements, des usagers (parents, élèves, étudiants…), des différents partenaires socio-économiques et des collectivités territoriales pourrait repérer les caractéristiques des différents publics, analyser leurs besoins, tracer les axes d’un projet d’activité.
Un apport nouveau en termes de ressources humaines pour les CIO. Aujourd’hui, un fonctionnement performant des CIO nécessite des apports nouveaux en termes de ressources humaines aptes à renforcer le travail des conseillers d’orientation psychologues aussi bien dans les établissements scolaires qu’en CIO. Des spécialistes des relations aux entreprises, des documentalistes et techniciens multimédias dotés également de compétences pédagogiques, des professeurs de documentation, mais également des chargés de mission, des ingénieurs d’études, des professeurs de sciences économiques et sociales, notamment sur la fonction observatoire. La fonction de premier accueil, information et documentation souvent prise en charge par les personnels administratifs, avec compétence, devrait être développée et se voir reconnue par recrutement à partir des formations de niveau III à ces techniques. Les spécialisations réversibles de certains COP pour répondre à des besoins spécifiques qui existent déjà devraient se développer, telles celles qui voient les COP travailler dans, ou en lien avec, l’enseignement supérieur, les points relais Europe, les prisons, la protection judiciaire de la jeunesse, les DRONISEP, les SAIO. D’autres domaines de spécialisation pourraient faire l’objet de fléchages spécifiques : formation des équipes éducatives, VAE, développement de l’apprentissage, bilan de compétence, handicap, publics prioritaires en zones « ambition réussite »…
- Partage des compétences et formation. Dans un contexte où les enseignants sont appelés à prendre une part de plus en plus grande dans le développement des compétences à s’orienter des élèves, il est nécessaire de définir de façon claire les ressources que constituent le CIO et les conseillers d’orientation psychologues en termes de formation des équipes.
- Conserver et définir un haut standard de formation pour les conseillers d’orientation psychologues. On a vu tout au long de ce texte la complexité des questions posées et la multitude des domaines concernés par le champ de l’orientation. Dans ce contexte, comme cela se pratique dans de nombreux pays, il est indispensable d’identifier les différentes pratiques d’accompagnement des publics et les niveaux de formation correspondants. La pratique des conseillers d’orientation psychologues correspond à une formation de type master, de haut niveau, dont les contenus s’articulent autour de la psychologie, de l’économie, de la sociologie, de la connaissance des milieux professionnels et des structures du monde éducatif, de l’évaluation des dispositifs et des interventions. Cette pratique doit s’accompagner du développement d’une formation continue de niveau équivalent.
Conclusion
Au moment où se réexamine, dans la société, la fonction orientation au regard des défis du 21e siècle, - nouveaux modes d’accès à l’information, orientation tout au long de la vie, besoins mouvants s’inscrivant dans des contextes économiques incertains, nécessité d’adaptation permanente à cette incertitude -, il semble que le temps de la construction et du développement des individus ne puisse être laissé plus longtemps en lisière.
La capacité d’autonomie de chacun à se forger des choix pertinents, de formation, de professionnalisation, d’emploi et, de plus en plus, d’en reprendre tout ou partie du cycle, impose que l’on accorde du respect aux rythmes de développement de chaque individu.
Si l’on veut bien considérer que l’accompagnement/procédure/placement, l’insertion pour le dire simplement, a toutes les chances d’être facilité par un accompagnement/processus, tout ce qu’on a dit du conseil individuel et de l’ingénierie de l’orientation, sous ses diverses formes, fait sens. S’en dégagent, à la fois, la spécificité de la fonction de conseil en orientation, et la nécessité d’une structure forte, le CIO, qui en permette la maîtrise d’ouvrage, ou y contribue, aussi bien que la mise en œuvre. Ce sont les conditions d’actions répondant aux besoins réels des publics s’orientant.
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