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Le service public d’orientation (SPO) : un feuilleton présidentiel

12 janvier 2013, par ADAMUS Zbyslaw


Un épisode tous les trois ans :

2006

Le 26 juin 2006, lors d’une interview à France 2 sur les résultats et priorités de la politique gouvernementale, Jacques CHIRAC, président de la République, déclare :

« […] Quelle est la feuille de route que je donne au gouvernement ? D’abord, bien entendu, la politique de l’emploi, poursuite de cette politique et notamment, tout ce qui concerne la baisse des charges nécessaires pour l’emploi. Et, en même temps, je demande au Premier ministre de créer, avant la fin de l’année, un service public de l’orientation car on ne peut pas, indéfiniment, laisser un grand nombre de jeunes choisir des orientations alors qu’on sait parfaitement qu’il n’y a pas d’emploi à la clé. Deuxième point qui préoccupe les Français, c’est le pouvoir d’achat. C’est un problème pour les Français. »

2009

« 1. Réussir enfin l’orientation au sein du système de formation.

- Un véritable service public de l’orientation sera mis en place. L’information des jeunes sur les filières de formation et leurs débouchés professionnels sera généralisée. Les opérateurs nationaux de l’orientation seront rapprochés et dotés d’un portail internet et d’une plate-forme téléphonique commune pour la rentrée 2010.

- L’orientation sera placée au cœur de l’éducation nationale. Elle sera intégrée dans les projets des établissements. Au cours de la scolarité, des étapes permettront aux jeunes de bénéficier d’actions de découverte des métiers, d’information sur les filières de formation, de conseil sur les choix possibles. Un droit à la réorientation sera expérimenté, pour permettre à certains élèves de rompre avec l’enfermement dans des parcours d’échec, tant dans le secondaire que dans le supérieur.

- Un livret de compétences élargi au-delà de l’éducation nationale sera expérimenté, afin de valoriser les compétences et potentialités des jeunes sans les limiter aux seuls résultats académiques (aptitudes acquises par l’engagement dans des activités associatives, sportives et culturelles…). L’outil sera mis en place début 2010 dans une première série d’établissements et académies volontaires, qui travailleront en partenariat avec tous les acteurs concernés (y compris les mouvements d’éducation populaire). […] »

Dossier de presse « Agir pour la Jeunesse », synthèse des mesures

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Le 29 septembre 2009 en Avignon, dans son discours « Agir pour la Jeunesse », le président de la République, Nicolas SARKOZY, exprime ainsi sa vision de l’orientation : « Il n’y a pas d’accès à l’autonomie sans une école qui permette à un jeune de choisir ce qu’il veut faire dans la vie. Or, le problème de l’orientation aujourd’hui dans notre pays c’est qu’elle n’existe pas ou si mal. Je veux dire que l’idée qu’on peut choisir sa vie à la suite d’un seul rendez-vous ou d’une visite à la seule journée des métiers, cette idée est absurde. De la même façon, est extrêmement condamnable l’idée qui consiste à demander à un jeune en seconde de faire un choix qui serait définitif. Je plaide pour que l’orientation soit progressive sur tout le temps de la durée du lycée, seconde, première, terminale et que chaque famille et chaque jeune aient le droit, je dis le droit de revenir sur leur choix. »

Quelques semaines plus tard, au Palais de l’Elysée, le 13 octobre 2009, dans son discours sur la Réforme du lycée, il évoque à nouveau l’orientation :

« Premier point : notre système d’orientation va connaître, j’emploie le mot à dessein devant vous, une véritable révolution.

A partir de maintenant, l’orientation devient progressive et surtout réversible.

A partir de maintenant, l’orientation permettra à chacun de se déterminer en pleine connaissance de cause, selon ses goûts et ses compétences.

C’est un chantier prioritaire, dont dépend tout le reste. »

2012

« Une École qui aide chaque élève à trouver sa voie : un service public de l’orientation

L’orientation des élèves est une mission essentielle de l’École. Ses deux dimensions, l’information et le conseil d’une part, la décision d’affectation dans telle ou telle formation d’autre part, doivent évoluer pour passer d’une orientation trop souvent subie, fortement corrélée aux origines sociales, à une orientation choisie. Cela implique une préparation tout au long de la scolarité, mais aussi une simplification des structures, dont la complexité pénalise les familles qui n’ont pas accès aux codes de l’institution. Parce que la massification de l’accès aux formations secondaires n’a pas généré une réelle démocratisation, une action doit également être menée contre la persistance de stéréotypes discriminants et de comportements d’autocensure sociaux et de genre qui limitent les horizons des filles et des garçons. Un pilotage national et une clarification des responsabilités des acteurs sont dès lors indispensables.

- Dans le cadre du socle commun, mettre en place dès le collège une démarche éducative de construction et d’appropriation de l’orientation assurée par les personnels de l’éducation nationale sous l’autorité du chef d’établissement.

- Associer davantage les parents aux choix d’orientation et prévoir systématiquement un dialogue et une médiation en cas de désaccord. Il convient à ce titre d’expérimenter la possibilité de laisser aux parents le « dernier mot » en matière d’orientation en fin de seconde (voire en fin de 3e) et sur le redoublement à tous les niveaux de la scolarité.

- Instituer un service public régional de l’orientation pour mettre en réseau les différents dispositifs existants et répondre ainsi plus efficacement aux besoins des différents publics jeunes ou adultes au sein des territoires.  »

Rapport de la concertation « REFONDONS L’ECOLE DE LA REPUBLIQUE »

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Le 9 octobre 2012, à la Sorbonne, à l’occasion de la remise officielle du rapport, en clôture de la concertation sur l’Ecole, François HOLLANDE, président de la République, déclare :

« Plus largement, c’est toute l’orientation des élèves qu’il convient de revoir. L’objectif, c’est de passer d’une orientation subie souvent liée à l’origine sociale, à une orientation choisie débouchant sur une perspective professionnelle et à terme sur un métier.

Ce sera le sens du service public régional de l’orientation qui coordonnera les dispositifs existants et qui proposera lorsque c’est nécessaire une deuxième chance. »

Et quelques minutes plus tard :

« De même, sans perdre de temps sera mis en place le service public territorialisé de l’orientation, sera lancée l’ambition numérique et une nouvelle gouvernance plus collégiale permettra de réfléchir au programme et d’évaluer notre école. »

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Entre régional et territorialisé, il y a plus qu’une nuance.

L’ambigüité sera levée le 6 décembre 2012, avec la diffusion de l’avant-projet de loi de décentralisation et de réforme de l’action publique ; en ce jour de fête des écoliers, ce n’est pas un SPO, mais vingt-sept petits SPOR qui sortent de la hotte.

Mais nous n’avons aucune assurance que ceux-ci donneront naissance à des plantules identiques dans chacun des terroirs, d’autant que le texte prévoit que si c’est à l’Etat de définir, au niveau national, la politique d’orientation des élèves, c’est aux régions qu’il appartiendra de déterminer les missions des CIO et d’en assurer la construction, la reconstruction, l’équipement, la maintenance et le fonctionnement !

2015

Nous attendons le prochain épisode avec impatience…

Z.A.

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SPO, feuilleton présidentiel

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